Structure, croissance et remaniement des os

1 Les différents types d’os

Le squelette humain est composé de 206 os se répartissant en trois catégories : les os longs, tels l’humérus ou le fémur, les os courts comme ceux du tarse et les os plats tels l’omoplate ou les os crâniens.

Exemples des trois types d'os, issus d'un squelette humain: l'os iliaque (en haut à gauche) et l'omoplate (en haut au milieu) sont des os plats, une vertèbre (en haut à droite) est un os court et le fémur (en bas) est un os long (20/01/2002 - Photographie originale réalisée par Eric Walravens).

De ces trois types, les os longs sont les plus complexes et possèdent les structures des os des deux autres catégories.

2 Morphologie d’un os long

Extérieurement, un os long comprend un corps cylindrique ou diaphyse, et deux têtes renflées ou épiphyses.

Fémur humain, exemple d'os long dont une coupe longitudinale montre la structure interne des épiphyses et de la diaphyse (20/01/2002 - Photographie originale réalisée par Eric Walravens).

Sur l’os frais, les surfaces articulaires, lisses et brillantes, sont recouvertes d’une mince couche de cartilage, tandis que le reste de l’os, rugueux et mat, est tapissé d’une membrane fibreuse et adhérente faite de tissu conjonctif, le périoste. Sur l’os sec préparé, cartilage et périoste ayant été éliminés, la substance osseuse est à nu.

La surface de l’os présente ici et là des saillies irrégulières permettant l’insertion des tendons et des ligaments, et des trous nourriciers par où pénètrent vaisseaux sanguins et nerfs.

Détail d'un fémur humain montrant des trous nourriciers, indiqués par les flèches (20/01/2002 - Photographie originale réalisée par Eric Walravens).

En coupe longitudinale, la substance osseuse présente deux aspects :

Coupe longitudinale dans la diaphyse d'un fémur humain dont on a enlevé la moelle jaune (18/01/2002 - Image originale réalisée par Eric Walravens).

Coupe longitudinale dans l'épiphyse d'un fémur humain dont on a enlevé la moelle rouge (18/01/2002 - Image originale réalisée par Eric Walravens).

3 Composition chimique de la matière osseuse

La dualité chimique de la matière osseuse peut être traduite par deux expériences simples.

L'os friable obtenu par calcination réagit complètement avec les acides, ce qui démontre que l'os n'est fait que des deux composants mis en évidence.

Si l'on pèse l'os calciné, on se rend compte qu'il a perdu 1/3 de sa masse initiale: il est donc constitué d'1/3 d'osséine et de 2/3 de sels minéraux.

4 Structure cellulaire de l’os compact

L’os compact est fait de nombreuses unités structurales appelées ostéons ou ostéones. Les ostéons peuvent être comparés à des cylindres dont le grand axe est parallèle à celui de l’os long. En coupe transversale, chaque ostéon est constitué de 10-15 lamelles disposées concentriquement autour du canal de Havers où passent vaisseau sanguin et nerf. L’os compact est percé, entre deux lamelles concentriques ou dans l’épaisseur des lamelles de l’ostéon, de nombreuses minuscules cavités, les ostéoplastes, qui abritent chacune une cellule, un ostéocyte.

Les canaux de Volkmann, perpendiculaires aux canaux de Havers, relient ces derniers entre eux, mais aussi au canal médullaire de la diaphyse et à l’extérieur de l’os où ils débouchent par les trous nourriciers.

Les ostéocytes sont des cellules osseuses matures en forme d’étoile et dont les prolongements s’étendent dans de très fins canalicules reliant les ostéoplastes entre eux et aux canaux de Havers et de Volkmann.

Dessin illustrant la structure fine de l'os compact.

Au cours de la formation de l’ostéon, les ostéoblastes, cellules osseuses embryonnaires, déposent autour d’eux de l’osséine qui est progressivement minéralisée. Ainsi devenu ostéocytes, ces cellules emmurées reçoivent néanmoins encore des nutriments et de l’oxygène par les fins canalicules qui les relient et qui servent aussi à l’élimination des déchets.

Les lamelles interstitielles occupent les espaces entre les ostéons. Ces lamelles sont des fragments d’anciens ostéons qui ont été partiellement détruits durant le remaniement osseux. On parle parfois d’ostéons interstitiels.

5 Développement,croissance et régénération de l’os compact

5.1 Formation de l’os

5.1.1 Types d’ossification

La formation de l’os débute par la migration de cellules conjonctives embryonnaires, les cellules mésenchymateuses, vers les régions où l’ossification est sur le point de commencer. Ces cellules grossissent et se multiplient; certaines se transforment en ostéoblastes si les capillaires sont présents, en chondroblastes s’il n’y a pas de capillaire sanguin.

Le squelette non encore osseux d’un embryon est formé de membranes fibreuses et de cartilage. L’ossification se fait parfois à la surface ou dans l’épaisseur des membranes fibreuses (=ossification endomembraneuse des os plats du crâne par exemple), mais, le plus souvent, c’est un modèle cartilagineux qui sert de point de départ; dans ce dernier cas, l’ossification est à la fois interne (=ossification endochondrale) et externe (=ossification périostique).

5.1.2 Ossification périostique

Au début, l’ébauche cartilagineuse du futur os est entouré, au niveau de la diaphyse, d’une membrane, le périchondre. A mi-hauteur de cette ébauche pénètre un vaisseau sanguin qui transforme le périchondre en périoste et favorise la différenciation d’ostéoblastes, qui commencent à former une virole, un manchon d’os compact autour du centre de la diaphyse.

Développement d'un os long (d'après Vincent, modofié).

5.1.3 Ossification endochondrale

L’ossification endochondrale est donc le remplacement progressif du cartilage par de l’os. La présence de vaisseaux sanguins au niveau du centre d’ossification primaire (au centre de la diaphyse) provoque la multiplication des cellules cartilagineuses (les chondrocytes) qui forment des files longitudinales parallèles à l’axe de l’os long, l’hypertrophie de ces cellules, la minéralisation (pr de sels de calcium) du cartilage puis la mort des chondrocytes hypertrophiés emmurés dans une substance qui ne laisse plus diffuser les nutriments. Le cartilage qu’ils entretenaient se désagrège, formant des cryptes dans la diaphyse. Ces cryptes sont agrandies par l’action des ostéoclastes pénétrant dans l’ébauche cartilagineuse en même temps que les vaisseaux sanguins et les cellules mésenchymateuses responsables de l’ossification après s’être transformées en ostéoblastes. Les ostéoblastes sécrètent dans ces cryptes, en remplacement du cartilage détruit, de l’extérieur vers l’intérieur, des lames de substance osseuse où ils demeurent emprisonnés et deviennent ostéocytes. Ainsi se forment les ostéons dont les canaux de Havers renferment les vaisseaux sanguins capillaires responsables de leur édification. Le phénomène décrit se poursuit de proche en proche vers les épiphyses au fur et à mesure, mais plus rapidement que l’ébauche cartilagineuse de l’os grandit.

Processus d'ossification (d'après Mackean et Jones, modifié).

Un peu plus tard, un centre d’ossification secondaire apparaît dans chaque épiphyse et, après quelque temps, l’os diaphysaire n’est plus séparé de l’os épiphysaire que par une fine lame cartilagineuse : le cartilage de conjugaison.

Radiographie de la main d'un enfant de 8 ans (Robin W. - 28/11/2000 - Image originale). Les flèchent indiquent des cartilages de conjugaison.

Radiographie de la main d'un adulte de 36 ans (Eric W. - 03/11/1998 - Image originale). Il n'y a plus de cartilages de conjugaison, la croissance osseuse étant terminée. L'image n'est bien sûr pas à la même échelle que celle de la main de l'enfant.

Enfin, les ostéoclastes creusent la cavité médullaire au centre de la diaphyse, où se logera un tissu conjonctif qui deviendra progressivement de la moelle jaune.

5.2 Croissance et régénération osseuse

Lorsque la calcification a pris fin, le tissu osseux ne peut plus croître à partir de son centre. La croissance se fait en longueur ou en épaisseur, par l’addition de couches supplémentaires de tissu autour de l’enveloppe extérieure de l’os, au niveau du périoste (pour la croissance en épaisseur) ou du cartilage de conjugaison (pour la croissance en longueur).

(d'après Vincent).

Dans le tissu osseux adulte, des capillaires sanguins accompagnés d’ostéoclastes et de cellules mésenchymateuses pénètrent sans cesse, détruisant le tissu osseux vieilli en creusant de nouvelles cryptes et édifiant de nouveaux ostéons. Les nouveaux ostéons apparaissent là où la plus forte pression est exercée sur le tissu osseux. De ce fait, celui-ci acquiert une plus grande résistance aux endroits sollicités.

5.3 Facteurs de croissance et homéostasie osseuse

5.3.1 Homéostasie osseuse

Après qu’il a atteint sa taille adulte et sa forme définitive, l’os est en perpétuel remaniement. Malgré ce remaniement, la structure et la composition osseuses demeurent constantes, grâce aux mécanismes homéostatiques régulateurs.

Le remaniement assure le remplacement du tissu osseux lésé et permet à l’os d’emmagasiner le calcium indispensable pour le squelette, la contraction musculaire, la conduction de l’influx nerveux et la coagulation sanguine. Le sang puise ainsi dans les os le calcium nécessaire et y stocke ses réserves.

Les ostéoclastes sont responsables de la résorption osseuse. Ces grandes cellules plurinucléées de la même lignée que les macrophages, développent une bordure en brosse au contact de l’os qu’elles attaquent : des enzymes digèrent le collagène et les acides citrique et lactique produits dissolvent les sels minéraux.

5.3.2 Facteurs de croissance non hormonaux et rachitisme

La croissance normale des os chez l’enfant et le renouvellement de la matière et de la structure osseuses chez l’adulte dépendent de plusieurs facteurs :

Le rachitisme est, chez l’enfant en croissance, l’équivalent de l’ostéomalacie chez l’adulte, c’est-à-dire le résultat d’une minéralisation insuffisante des os, qui deviennent mous et fragiles (manque de calcium ou de vitamine D). L’ostéomalacie est une cause de torsion, de déformation et de fracture des os.

5.3.3 Hormones de croissance

Enfin, l’organisme doit produire, en quantité suffisante, plusieurs hormones :

Affiche népalaise montrant une femme atteinte d'un goitre et incitant les victimes à se faire soigner.

Localisation de toutes les glandes endocrines du corps humain, dont les hormones de certaines régulent la croissance et la régénération osseuse.

5.3.4 Ostéoporose

L’ostéoporose est un état de fragilité osseuse consécutif à l’amenuisement des lamelles osseuses, conférant à l’os un aspect poreux. La cause en est un déséquilibre entre l’activité déficitaire des ostéoblastes et la résorption osseuse ostéoclastique normale. Pratiquement, l’ostéoporose trouve son origine dans le manque d’activité -et donc des efforts soumis aux os-, ce qui réduit la stimulation normale de l’activité ostéoblastique, et dans la diminution des œstrogènes à la ménopause: en effet ces hormones sexuelles stimulent la synthèse des protéines, et donc le dépôt de matière osseuse par les ostéoblastes.

Pour prévenir les accidents consécutifs à l’ostéoporose post-ménopausique, il existe un examen simple permettant de mesurer la quantité de matière osseuse des os : la densitométrie. Cette technique diagnostique est un examen de la densité des os (on l’effectue au niveau des vertèbres et d’un os long, le fémur le plus souvent) par analyse de l’image du squelette, soumis à de très faibles quantités de rayons X, par des méthodes informatiques très complexes. Cette analyse indolore, ne nécessitant aucune injection ni aucun traitement, donne immédiatement des résultats avec une erreur maximale de 1%!

On utilise entre autres la calcitonine, associée à un régime adéquat en calcium et vitamine D, pour soigner l’ostéoporose.

5.3.5 Le thymus

Enfin, on constate que le thymus, situé dans la cage thoracique derrière le sternum mais devant les bronches, est une glande indispensable à la croissance et fort développée chez les jeunes mammifères. C'est, par exemple, le ris de veau chez les jeunes bovins. L'ablation de cette glande (thymectomie) chez de jeunes rats altère fortement le développement normal de ceux-ci: la croissance est ralentie en particulier par la mauvaise fixation osseuse de calcium. A l'âge adulte, le thymus des mammifères, dont l'Homme, ne régresse pas de taille, mais son tissu glandulaire est progressivement remplacé, à partir de 20 ans dans l'espèce humaine, par un tissu adipeux, non fonctionnel. Le thymus jouerait un rôle important dans le processus de vieillissement.