La biodiversité

Elocution présentée en 2003-2004 au cours de biologie par deux élèves de cinquième année: Maxime Delespes et Ceylan Topak.

1 Introduction

La biodiversité, contraction de « diversité biologique », est l'expression désignant la variété et la diversité du monde vivant. Dans son sens le plus large, ce mot est quasi synonyme de "vie sur terre".

Le monde vivant peut être considéré comme une suite de niveaux d'organisation de complexité croissante. Le premier niveau, le plus bas, est représenté par les molécules essentielles à la vie. Le plus complexe correspond aux écosystèmes. La diversité biologique est présente à chacun de ces niveaux. La notion de biodiversité recouvre donc un si grand nombre de concepts à des échelles et à des niveaux différents qu'il est impossible de la réduire à une seule unité de mesure.

Pour des raisons pratiques, on distingue en général trois niveaux de biodiversité:

Deux points importants ressortent de ces différentes définitions:

2 Diversité des espèces

2.1 Classification

Les espèces constituent, d'une certaine manière, l'étalon de mesure des sciences de la vie. C'est d'ailleurs sur elles que se concentrent la plupart des études menées par les écologistes ou les biologistes de la conservation. Mais, malgré l'importance du terme « espèce », il n'existe pas de définition univoque de ce mot. On a ainsi recours à un certain nombre de critères pour leur classification (dite taxinomique) en divers groupes (voir Classification des espèces). Ainsi, les espèces similaires sont groupées en genres, les genres en familles, les familles en ordres et ainsi de suite jusqu'à l'échelon supérieur, celui du règne. Mais ces critères seront différents selon que l'on veut classer une bactérie ou un oiseau. Dans certains cas, toutefois très rares, les taxinomistes n'utilisent pas tous les mêmes critères, et identifient un nombre d'espèces différent.

2.2 Niveau de biodiversité actuel

Il est impossible de connaître le nombre total d'espèces présentes sur Terre. Pour l'instant, 1700000 espèces animales ont été dénombrées et décrites, contre quelques centaines de milliers d'espèces végétales. En se fondant sur le nombre d'espèces nouvelles découvertes chaque année dans les forêts tropicales, on a pu réaliser des estimations : le nombre total d'espèces varierait de 5 à 100 millions ! Le chiffre moyen de 12,5 millions, qui semble "raisonnable", a été suggéré.

Ainsi, la majorité des espèces qui vivent sur notre planète nous sont inconnues. Le groupe le mieux répertorié est sans aucun doute celui des vertébrés, et plus particulièrement, dans celui-ci, les mammifères, dont l'Homme fait partie. Tous groupes confondus, on répertorie chaque année un grand nombre de nouvelles espèces: ainsi, ces dernières décennies, on a décrit quelque 200 poissons, 20 mammifères et 5 oiseaux. La découverte la plus étonnante est sans doute celle de trois nouvelles espèces de mammifères dans le nord du Viêt-nam. Cependant, beaucoup d'espèces "nouvelles" résultent d'une amélioration de la classification, qui sépare en deux ou trois certains groupes que l'on croyait uniques.

En revanche, pour les insectes, qui comportent un nombre gigantesque de représentants, plusieurs milliers de nouveaux spécimens sont décrits chaque année. En fait, le nombre des espèces enregistrées ne semble limité que par la rapidité des taxinomistes à étudier les nouveaux individus!

2.3 Espèces menacées

Espèces menacées, espèces végétales et animales menacées de disparition dans un avenir proche. Plusieurs degrés de risque ont été définis. Les espèces sur lesquelles pèse une menace critique, comme le condor de Californie, ne pourront sans doute survivre si l'Homme n'intervient pas. Ces espèces sont définies comme ayant subi, ou risquant de subir très rapidement, une diminution de leur population de 80%. Les espèces menacées voient chuter leur population de 50%. Les espèces vulnérables, quant à elles, ont accusé une perte de 20 à 50% de leurs effectifs. Enfin, les espèces rares, en nombre relativement réduit sur leurs aires de répartition, ne sont pas forcément en danger immédiat d'extinction.

L'extinction d'espèces est un processus normal de l'évolution. Le nombre d'espèces ayant disparu au cours des périodes géologiques est d'ailleurs supérieur à celui des espèces vivantes aujourd'hui. Leur disparition est due à d'importantes variations climatiques ou à leur incapacité à s'adapter à de nouvelles conditions. Toutefois, depuis le XVIIè siècle, le processus d'extinction s'est accéléré en raison de l'impact des activités humaines, notamment la croissance démographique, les progrès technologiques (industrialisation, pollution concomitante, tourisme de masse, etc.) et la destruction des écosystèmes. Désormais, les environnements se modifient trop rapidement pour que la plupart des espèces aient la possibilité de s'adapter à de tels bouleversements par le biais d'une sélection naturelle, l'évolution et l'apparition de nouvelles espèces (spéciation) étant des processus extrêmement longs.

3 Les causes

Les causes de la dégradation de la biodiversité sont directes et indirectes. Mais elles résultent en grande partie d'une expansion et d'une prédominance humaines non contrôlées.

Des forêts primaires sont abattues, l'installation de barrages anéantissent nombre d'écosystèmes : l'homme élargit sa niche écologique et ne prend pas toujours en compte la valeur de l'environnement dans ses systèmes économiques et politiques.

La surexploitation de nombreuses ressources forestières, halieutiques, et sauvages a provoqué l'extinction de certaines d'entre-elles.

Les pollutions des sols, de l'eau et de l'atmosphère sont à l'origine de perturbations d'écosystèmes et de contaminations en masse. Certaines populations sont alors réduites ou éliminées.

L'augmentation de la quantité de CO2 atmosphérique depuis la révolution industrielle de 1850 et la modification consécutive de l'effet de serre sont à l'origine de perturbations climatiques. L'élévation de température de 1°C à 3°C prévue pour le siècle à venir aura pour conséquence l'augmentation du niveau de la mer ainsi que le déplacement des limites de tolérance des espèces terrestres de 125 km vers les pôles, ou de 150 m de dénivelé au niveau des montagnes. Il est à prévoir une forte perturbation de la structure et du fonctionnement de nombreux écosystèmes, et même parfois leur élimination : plusieurs îles seront submergées, on peut aussi penser que certaines espèces contraintes à une migration rapide ne s'adapteront pas assez vite pour survivre.

L'utilisation par l'homme des espèces et des variétés les plus performantes et les plus adaptées au milieu où elles sont cultivées réduit la diversité agricole accumulée jusqu'à aujourd'hui : les plantations monospécifiques sont de plus en plus courantes.

La réduction du nombre des espèces cultivées s'accompagne de la disparition d'espèces ayant co-évolué pendant des siècles avec les systèmes traditionnels d'agriculture (bactéries fixatrices d'azote, associations mycorhiziennes, prédateurs, pollinisateurs…).

Dans de nombreux pays, la possession et le contrôle des terres et des ressource biotiques est assurée par une minorité de population. Celle-ci est souvent déconnectée du monde agricole et contraint les agriculteurs à concevoir leur itinéraire technique par rapport à des exigences économiques plutôt que dans l'esprit de conservation de la biodiversité. Et ceci peut se concevoir également à l'échelle internationale : face aux exigences d'un marché international mené par les pays les plus développés, les pays en voie de développement ne trouvent pas toujours l'opportunité de trouver des moyens de préservation de leurs ressources.

Les planifications gouvernementales sont souvent déconcentrées et par là-même déconnectées des participations et des implications au niveau local. Peu d'institutions ont assez de moyens pour être efficace : les plans de conservation sont rarement globaux et stratégiques. D'autre part, le droit coutumier de nombreux pays en voie de développement, respectueux des richesses naturelles, a été échangé au profit de mesures peu efficaces et peu effectives.

4 Faut-il sauver la biodiversité?

Depuis 1992 (sommet de RIO), la communauté scientifique alarme le monde sur la disparition de nombreuses espèces et les conséquences que pourraient avoir ces disparitions sur la biodiversité.

A l'image des êtres vivants pris en tant qu'individu, les espèces vivent et meurent. La durée de vie moyenne d'une espèce est de quelques millions d'années. La disparition naturelle et continue d'espèces s'accompagne de l'apparition de nouvelles espèces dans les niches écologiques laissées vide. Depuis l'apparition de la vie, on a observé une augmentation globale du nombre d'espèces (l'apparition d'espèces est plus rapide que leur disparition). D'autre part, l'évolution s'accompagne d'une tendance continue à l'accroissement de la biodiversité des écosystèmes continentaux et marins. Certaines période géologiques sont caractérisées par la disparition d'un grand nombre d'espèces vivantes en un laps de temps court à l'échelle géologique (quelque millions d'années); il s'agit de vagues d'extinctions.

La période actuelle est qualifiée de sixième vague d'extinction. On pourrait penser qu'il s'agit d'un événement naturel. Cependant, sous l'action de l'Homme, une espèce disparaît tous les trois ans alors que lors des vagues d'extinction en masse passées, une espèce disparaissait tous les cinquante ans. La vitesse d'extinction des espèces est donc 15 fois supérieure à tout ce que le terre a vue précédemment et elle continue de s'accroître. D'autre part, les espèces les plus en danger sont les vertébrés supérieurs, c'est à dire les êtres vivants les plus proches de l'homme et qui sont parmi les plus diversifiés (richesse importante du point de vue de la biodiversité). Si on ne fait rien, d'ici 2025, un quart des espèces animales pourrait disparaître. Jusqu'où leur principal prédateur, l'Homme, doit-il s'attacher à préserver la biodiversité ? On ne connaît rien des conséquences sur la nature de cette disparition d'espèces.

Du fait de l'implication de l'Homme dans ces disparitions (industrie, déforestation...) et des pertes de richesses qu'elles nous évoquent, la biodiversité est devenue patrimoine mondial de l'humanité et la majorité des gens s'accorde à dire qu'il faut la protéger et l'amplifier.

Mais l'espèce humaine est devenue un facteur majeur d'évolution.

L'Homme, comme toute autre espèce sur Terre, agit sur son environnement (de la même manière qu'un individu agit physiquement sur ce qui l'entoure). L'Homme moderne porte un jugement sur ses actes aux vues de leurs conséquences sur cet environnement (la nature). Le problème est de savoir si l'action de l'Homme sur la nature est normale (action d'une espèce sur son entourage) ou si le caractère omniprésent de l'Homme et l'ampleur des modifications qu'il entraîne nuit à la nature. Pour répondre à cette question, l'Homme fait appel à sa conscience et à des notions d'éthique. Il porte donc un jugement personnel et la réponse à la question "faut-il protéger la biodiversité ?" n'est pas objective. L'Homme ne peut pas protéger la biodiversité au nom des intérêts de la nature mais seulement pour ces propres intérêts et ceux des générations futures.

La diversité biologique est un patrimoine naturel et un support vital pour chaque peuple et pays. Les conditions qui ont permis le maintien en vie de toutes les espèces contribuent également à promouvoir et à assurer l'existence des générations actuelles et futures de l'espèce humaine.

Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Le principe de précaution veut que l'on conserve le maximum de potentialité, donc la biodiversité la plus importante possible. En protégeant la biodiversité pour ses intérêts, l'Homme est en position de prise de décisions. Il doit choisir quelles espèces protéger. Ces choix se font de manière arbitraire. L'Homme impose, dans le phénomène de sélection et de survie d'espèces, sa hiérarchisation du vivant. Lorsqu'il "protège" la biodiversité, il en modifie en fait l'évolution.

5 Efforts de préservation

C'est à partir du début du XXè siècle qu'ont été déployés des efforts, à la fois par les gouvernements et par le secteur privé, pour sauver les espèces menacées. L'une des premières tentatives est le recours au processus législatif. Les États-Unis ont promulgué, au début des années 1900, des lois visant à protéger la vie sauvage contre le commerce et la chasse abusive. Adoptée en 1973, la loi en faveur des espèces menacées propose un cadre législatif pour protéger les habitats dont dépendent certaines espèces menacées. Cette loi décourage également leur exploitation commerciale en interdisant l'importation et le commerce de tout produit dérivé de ces animaux. Les États-Unis ont également signé des accords avec d'autres pays, notamment avec le Canada et le Mexique, pour protéger les oiseaux migrateurs.

A l'échelon international, les efforts se concentrent sur la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), ratifiée par cinquante et un pays. Son objectif est de restreindre l'exploitation de la vie sauvage et de la flore, en réglementant et en limitant le commerce des espèces. Force est de constater, toutefois, que ces lois, quel que soit le pays où elles sont promulguées, ne sont efficaces que si elles sont respectées et soutenues par la population et par les tribunaux, ce qui n'est pas toujours le cas. Des braconniers et des revendeurs approvisionnant toujours le marché, l'avenir de nombreuses espèces paraît compromis en dépit de leur protection juridique.

Le 9 décembre 1996, l'Union européenne a voté un renforcement de la législation sur le commerce des espèces sauvages au sein des quinze pays membres, qui devient ainsi l'une des plus sévères au monde. Cette nouvelle loi, applicable à partir de juin 1997, interdit strictement tout échange commercial d'espèces en voie d'extinction, contrôle le commerce des espèces menacées et, surtout, rend obligatoire l'application des sanctions envers les trafiquants. Cette réglementation concerne 27000 espèces, dont quelque 3 % ne peuvent faire l'objet d'aucun commerce (c'est le cas, par exemple, des éléphants d'Afrique).